Le journal La Libre Belgique du 7 janvier 2017 dressait le portrait d'une personnalité politique :
Stéphane Moreau, le boulet (à la liégeoise) de Di Rupo : voici pourquoi le PS continue à le soutenir.
"Tout homme qui dirige, qui fait quelque chose, a contre lui ceux qui voudraient faire la même chose, ceux qui font précisément le contraire et surtout la grande armée des gens, d'autant plus sévères, qu'ils ne font rien du tout." Cette phrase de Jules Claretie (romancier français du 19ème siècle), Stéphane Moreau en a fait sa maxime. Phrase sévère pour toute critique, elle peut résumer l'état d'esprit de ce presque homme de l'ombre, à la communication ciblée, à la menace facile, à la pression chevillée au corps, à la violence des mots et des sentiments, au socialisme de papa et de "Papa", à celui d'André Cools, au sien surtout.
Le puissant patron de Nethys (ex : Tecteo, ex-ALE, ex-intercommunale du temps jadis), cité dans le récent scandale des rémunérations des administrateurs de Publifin (coupole publique des activités privées du groupe liégeois), est un homme coriace, ambitieux, d'argent sans doute, de pouvoir avant tout. A 52 ans, le bourgmestre socialiste d'Ans porte encore beau, cultive légèrement le look d'un cow-boy solitaire wallon. Sans foi ni loi ? Peut-être ! Il a déjà joué de nombreux rôles. Celui du "petit chose", d'abord. Qui, venant d'un milieu modeste, petit-fils d'un conseiller communal socialiste et cheminot, s'est élevé à la seule force de sa volonté. Qui, quand les copains du quartier s'étaient déjà rangés des cahiers, s'accrochait à ses études universitaires en économie et en sciences politiques.
De Rastignac à Brutus.
Celui du "Rastignac" ensuite, surtout et encore. Les dents longues, l'envie rapide de réaliser, de devenir, d'être. Celui de "Brutus" aussi, lorsqu'il poignarde un Michel Daerden dont l'étoile politique, mais pas populaire, commence à pâlir en terres liégeoises. Celui de "Citizen Kane", désormais, mais pour un temps seulement car qui sait ce qu'il prépare encore.
C'est à Alleur (Ans) qu'il goûte à la politique. Celle des ouvriers, celle de gauche. A 16 ans, il est déjà membre du PS. Un PS qui aujourd'hui le protège à Liège, le conchie partout ailleurs, tant il peut se montrer si peu docile aux volontés dirupiennes. C'est que chez Stéphane Moreau, on est de Liège. Et à Liège, cher Monsieur, lorsqu'on gère la chose publique, on est avant tout liégeois. Un nationalisme politique qui n'aurait parfois rien à envier à celui des gens du Nord.
C'est cet instinct liégeois qui le motive sans doute à transformer, depuis plus de 10 ans, une ancienne intercommunale de distribution d'électricité en un groupe à vocation internationale alliant, via ses filiales, le multimédia (VOO), les médias (l'Avenir, Moustique) et l'énergie (électricité et gaz). Et de Liège, évidemment, pour aller partout, sans frontières, jusqu'à racheter des parts d'un quotidien français ("Nice Matin"). Jusqu'à fricoter avec le pouvoir toujours en place au Congo, en compagnie d'un conseiller de luxe multifacettes (producteur, homme d'affaire, etc.), Dominique Janne. En Septembre 2015, les deux hommes accompagnaient une mission économique wallonne à Kinshasa. Pour vendre des Voocorder ? Allons donc. Ca reste fort opaque. Il était officiellement là comme patron de Nethys et d'Ogeo Fund (fonds de pension des institutions publiques liégeoises, l'un des + importants du pays). Comme le dit un cadre du PS, "il veut y jouer au ministre des Affaires étrangères. Attention à ne pas voir trop grand..."
En créant Tecteo (désormais Nethys, chapeautée par Publifin), il a joué un gros coup. En rachetant à prix d'or les câblo-distributeurs wallons, il a fait le bonheur de communes du Hainaut et d'ailleurs. Un bonheur à court terme pour elles, mais à long terme pour les communes liégeoises. En sortant de l'ancienne structure intercommunale (soumise à la tutelle wallonne depuis peu) les différentes activités qui en faisaient le sel, il en a fait une coquille vide et a ainsi pu cumuler sa fonction de directeur général de Nethys avec celle de bourgmestre d'Ans. Son fief, sa base. Quand il rachète les éditions de l'Avenir en 2013, le voilà patron de presse. Que la rédaction du quotidien régional mette tout de suite en place les garde-fous garants de leur indépendance en dit long sur la réputation qui précède leur nouveau patron. Quand il rachète "Moustique", quand il rachète des parts dans "Nice Matin", on voit ce qu'il veut faire. il va de l'avant. Il s'offre du contenu rédactionnel, il anticipe les révolutions à venir dans le secteur des médias et du divertissement télévisuel. Qu'a-t-il en tête ? Un "Netflix" wallon qui offrirait toute une gamme de service ? Peut-être... Si l'approche est sans doute visionnaire et ambitieuse, dans un monde mondialisé, la société manque assurément de transparence. Elle a aussi bénéficié, il y a quelques années, de l'aide indispensable du bureau McKinsey, en fait le véritable architecte du sauvetage et du déploiement de Nethys, un moment au bord de la faillite.
Si son père en poltiique, feu Michel Daerden, lui conseillait de ne jamais dévoiler ses émoluments parce que de toute façon, "c'est toujours trop", cette façon de ne jamais reconnaître les montants très (trop ?) importants qu'il est soupçonné de gagner, paraît suspecte aux yeux de l'opinion publique. (...)
Le dernier mot reviendra à un ponte du PS qui se désole du manque de transparence du bonhomme : "Alors que le projet Nethys est positif, pour le déploiement liégeois certes, mais aussi wallon, qu'il est bon pour l'emploi et qu'il est ambitieux, sa manière d'agir le rend opaque et prête, dès lors, à toutes les interprétations. Il donne le sentiment d'avoir quelque chose à cacher, et en politique, ce n'est jamais bon, surtout à l'heure actuelle." Moreau n'est ni Satan, ni un saint. La vérité est sans doute au milieu, même si pour beaucoup, elle penche plus du côté diabolique que de l'autre. Comme souvent, comme toujours, la vérité est grise.
La science politique connaît différentes focales dans les analyses du pouvoir. Quelle(s) approche(s) s'applique(nt) le mieux à l'analyse de cet article ?
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